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Interview
Entretien avec Valérie Mangin pour Alix Senator
Dans les luttes au sommet du pouvoir, le symbole est une arme !
Nous avons posé 5 questions à Valérie Mangin, latiniste, historienne, historienne de l’art, mais surtout, la scénariste d'Alix Senator . L'occasion d'en apprendre plus sur l'Empire Romain, les manigances politiques sous Auguste mais aussi leurs corrélations avec le monde d'aujourd'hui...
Alix est à présent sénateur, père et quinquagénaire : quel est l’impact de cette évolution sur ses choix et ses actions dans Alix Senator ?
La vie a forcément changé le sénateur Alix. Jeune homme, il avait un rapport un peu manichéen à la réalité et il choisissait toujours le bien contre le mal, sans émotion particulière. C’était un vrai héros. 30 ans plus tard, il ne peut plus agir ainsi. Il est très attaché à son fils Khephren et celui-ci a choisi une voie dangereuse et franchement malsaine : l’adoration d’une divinité castratrice. Alix sait qu’il ne pourra pas le raisonner, alors il préfère l’aider à vivre à tout prix plutôt que l’abandonner à sa folie. Il sait que c’est sans issue, au moins à court terme, mais son amour paternel est devenu plus fort que sa raison.
Pouvez-vous nous dire quelques mots sur le rôle des Sénateurs sous Auguste ? Un Sénateur voyageur tel qu’Alix était-t-il commun ?
Avec l’avènement de l’empire, les sénateurs, l’aristocratie romaine, ont perdu une grande partie de leur pouvoir politique. Souvent ils ne font plus que valider les décisions impériales. Par contre, ils jouent toujours un très grand rôle dans l’administration civile et militaire de l’empire. Les sénateurs gouvernent des provinces, dirigent des légions, effectuent des missions diplomatiques… Beaucoup voyagent comme Alix aux quatre coins de la Méditerranée pour le service d’Auguste, même s’ils le font en général dans des conditions beaucoup plus confortables et officielles.
La vie politique actuelle peut-elle être une source d’inspiration pour une série historique comme Alix Senator ?
On est forcément influencé par ce qu’on vit. Je n’aurais pas écrit ce tome 6 d’Alix Senator, avec une oasis sacrée prise en otage par différents peuples avec des identités politiques et surtout religieuses différentes, si le Moyen-Orient était en paix en ce moment.
Reste que je me méfie et que j’évite de me servir d’événements actuels, politiques ou autres, comme sources d’inspiration directe. Même si l’ambition et le goût du pouvoir sont restés les mêmes depuis l’Antiquité, notre situation politique est bien différente de celle qu’aurait connu Alix. Bien apaisée aussi : aucun candidat à la présidentielle n’en a empoisonné un autre ni n’a envoyé sa garde pour massacrer les militants adverses, heureusement !
Pourriez-vous comparer Alix à un personnage politique romain existant ? Si oui, pourquoi ce choix ?
Le sénateur Alix n’est inspiré directement d’aucun personnage historique. Il est simplement le résultat de l’évolution du héros de Jacques Martin confronté aux guerres civiles romaines, à la montée au pouvoir d’Auguste et, de manière plus intime, à des drames amoureux (que je me réserve encore de raconter) et à la paternité.
C’est un choix délibéré : je préfère garder les personnages historiques dans leur propre rôle. C’est plus amusant.
Dans les derniers tomes d’Alix Senator, Khephren semble se départir d’Alix, avec une furieuse envie d’émancipation. Pourrait-on imaginer que le fils affronte un jour son père ?
On peut tout imaginer. Je ne m’interdis rien dans Alix Senator. D’ailleurs, à la fin du tome 3, Khephren a déjà trahi Alix pour sa pire ennemie Livie. Depuis, il s’est mis en quête littéralement de « la puissance et de l’éternité ». Qui sait où ça le mènera ?